Je vous partage ici un texte que j’ai conçu pour les élèves qui suivent mes cours de chant afin de les soutenir dans la préparation de leurs examens, auditions et concerts. Tout ce que j’évoque est à mon sens transposable à d’autres types de situations, comme parler en public par exemple!
Je profite de remercier mon amie Anne Dupont pour son soutien dans la création de ce texte!
« Quand nous avons le trac, une part de nous a peur à l’idée d’une prestation en public, quelle qu’elle soit. Face à cette prestation, nous sommes partagés à l’intérieur, car une part dit : « Oui, on y va » et une autre part a (un peu, très, terriblement, …) peur d’y aller.
La première part qui dit : « Oui, on y va » n’a pas du tout envie de ressentir le trac. D’abord, parce que ce sont des sensations physiques très désagréables. Ensuite, parce que le trac risque de lui faire perdre ses moyens sur le moment et de ne pas lui permettre d’assurer la prestation comme elle le souhaiterait.
Que faire ?
Je te propose ici une méthode issue de la Communication NonViolente Ò. Cette approche est inhabituelle et demande une certaine ouverture d’esprit. Elle est basée sur l’accueil de cette part qui a peur. Elle se situe ainsi à l’opposé de ce que nous avons l’habitude de faire avec les sensations désagréables : nier, fuir, enfouir, refouler, etc. Ou au contraire dominer, maîtriser, vaincre, etc.
En effet, vouloir faire taire cette part qui a peur et qui l’exprime est le meilleur moyen pour la faire grandir. Ou alors qu’elle se tapisse dans un coin et déboule décuplée au moment même de la prestation.
Accueille la part qui a peur
Installe-toi avec du temps devant toi dans un endroit calme où tu sais que tu ne seras pas dérangée et prends une position confortable.
Projette-toi au moment de la prestation. Laisse monter les sensations. Observe ce qui se passe dans ton corps. Cherche à mettre des mots dessus. Tu peux dire à voix haute : « J’ai mal au ventre, je sens mon cœur s’accélérer, je sens ma gorge qui se serre, j’ai chaud, je sens des tremblements, j’ai la bouche sèche, j’ai le tournis… ». Les sensations ont une limite : si nous les laissons monter, au bout d’un moment (qui n’est pas nécessairement long) elles plafonnent et redescendent.
Ecoute-la
Peut-être qu’au-delà des sensations physiques, cette part a des choses à te dire. « J’ai peur, je me dis que je suis nulle, je ne suis pas prête, je me dis que je n’ai pas les moyens d’y arriver, j’ai peur d’être jugée, j’ai peur d’être l’objet de critiques et pire encore de moqueries, j’ai peur de me tromper, j’ai peur d’un trou de mémoire, j’ai peur des fausses notes, j’ai peur d’être déçue, j’ai peur que tout le monde sois meilleur que moi, j’ai peur d’avoir la braguette ouverte ou une branche de persil dans les dents, j’ai peur d’être ridicule ! » Quoi que ce soit, écoute ce qu’elle te dit avec bienveillance. Et émerveille-toi de son imagination !
Reconnais ce qu’elle fait pour toi !
En s’affolant, cette part cherche à te protéger de la souffrance. Elle se dit que cette prestation va te faire ressentir des émotions trop violentes comme la déception, la honte, la culpabilité, le découragement, et qu’il vaut mieux éviter de s’exposer à cette situation. Dis-lui merci de chercher à te protéger ! Nos parts n’agissent jamais contre nous ! Même si parfois leurs stratégies sont difficiles pour nous !
Donne-lui de la légitimité !
Sa peur est légitime ! Chanter en public n’est pas évident ! S’exposer au regard des autres est quelque chose que redoute la plupart des humains. Nous sommes alors dans une grande vulnérabilité. C’est un défi ! Et il n’est pas évident à relever. C’est aussi une intense activité pour le corps : coordonner le souffle, le son, la mémoire, l’imaginaire, la musicalité… Tous nos sens et nos systèmes tournent au maximum à ce moment-là !
Rassure-la !
Cette part qui a peur a besoin d’être rassurée. Parle-lui à voix haute comme tu le ferais avec un enfant ou un animal affolé. Demande-lui aussi ce qu’il lui faudrait pour se sentir rassurée. Peut-être qu’elle a des idées ?
Peut-être qu’elle peut s’appuyer sur des expériences passées de ce genre auxquelles elle a survécu, où elle a même eu du plaisir.
Cette part sera aussi rassurée par ta préparation : si les chants sont bien connus, les paroles bien mémorisées, le corps préparé, la voix reposée et chauffée, elle aura moins de raisons concrètes de paniquer.
Rassure-là que tu as les moyens de participer à cette prestations : tu as suivi des cours de chant depuis X année(s), tu as bien travaillé tes partitions, tu as répété le morceau avec le pianiste, tu as déjà fait des auditions…
Réduisez ensemble la pression : tu vas faire de ton mieux. Pas besoin de tenter l’impossible et de fixer la barre trop haut : juste faire de ton mieux dans le moment présent.
Regardez ensemble quel est le risque réel, même si le pire se produit (et d’ailleurs qu’est-ce qui serait le pire pour elle ?) qu’est-ce que ça aura comme conséquences ?
Peut-être qu’elle se sentirait plus rassurée s’il n’y a pas certaine personnes dans le public, comme papa, maman qui nous aiment mais que nous avons peur de décevoir, certains amis qui détestent le chant classique, ou au contraire notre meilleure amie qui aspire à une grande carrière dans la pop… Pas besoin donc d’inviter tout Genève !
Donne-lui du sens !
Explique-lui pourquoi vous allez ensemble faire cette prestation. Peut-être qu’elle ne voit plus ou pas le sens de la démarche! Explique-lui que chanter à l’audition permet de progresser, de nourrir le plaisir de chanter pour d’autres personnes, de partager… Une audition permet de mesurer le chemin parcouru dans l’apprentissage et de fixer aussi de nouveaux objectifs. Cela permet de relever un défi, de tester ses limites, de se sentir fière ensuite de l’avoir faite. Cela contribue à l’estime de soi. Trouve des raisons qui ont du sens pour toi !
Tu peux faire cet exercice aussi souvent que nécessaire en lui donnant rendez-vous ou chaque fois que la peur revient. Un cours de chant peut aussi être un espace où j’explore avec toi cet exercice : on a parfois besoin de soutien pour affronter ses peurs ! Cet exercice peut être utilisé pour toutes les peurs que tu rencontres dans ta vie.
Une part qui a peur, lorsqu’elle est ressentie, vue, entendue, rassurée et qu’elle comprend le sens va se calmer et faire alliance avec toi pour le bien du système global.
Faire preuve d’autorité
Toutefois, c’est une question d’entraînement. Si la part s’accroche, ressurgit et se montre très active juste avant la prestation, et ceci malgré des moments passés avec elle, tu peux alors, dans l’urgence d’être en pleine possession de tes moyens, faire preuve d’autorité et lui dire fermement : « Je t’ai vue, mais là ce n’est plus le moment. J’ai atteint mes limites. Je te respecte, mais je refuse d’être envahie par toi maintenant ! Nous en reparlerons plus trad. » Cette phrase peut être accompagnée d’un mouvement physique fort (comme taper des pieds, boxer dans le vide, pousser de grands soupirs) qui n’est pas dirigé contre la part qui a peur, mais pour se libérer temporairement de son énergie. »
Une séance individuelle d’empathie est un moment idéal pour explorer le trac, n’hésite pas à me contacter!